Le FMI alerte sur les dettes publiques

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Le FMI vient de publier son dernier « Fiscal Monitor », qui mérite notre attention car il sort au moment précis où la Chine tente de rajeunir son économie avec une énorme relance budgétaire et que les Etats-Unis semblent voués à vivre avec une dette publique en forte hausse, quel que soit le vainqueur de l’élection le 5 novembre prochain. Le FMI alerte car la dette publique mondiale s’est envolée depuis 5 ans et se dirige droit vers le niveau de 100% du PIB mondial.

Une dette à 100.000 milliards

On sait que depuis la crise financière de 2008, chaque crise s’est en partie solutionnée par une hausse des dépenses publiques et un recours massif à la planche à billets, qui n’est en réalité rien d’autre que le fait de faire financer la dette publique par la banque centrale. Le FMI vient de publier la dernière édition de son rapport « Fiscal Monitor », et l’institution épingle la nette dégradation des finances publiques mondiales depuis la crise sanitaire de 2020, prévoyant que la dette publique mondiale dépassera vraisemblablement les 100.000 milliards de dollars d’ici la fin de l’année, soit 93% du PIB mondial. Le FMI souligne tout au long de son rapport la nécessité d'une action plus dure pour stabiliser les emprunts dans les principales économies du monde. La dette publique, qui a explosé pendant la pandémie de Covid-19, a continué d'augmenter car les pays adoptent des dépenses plus élevées pour stimuler la croissance économique, les États-Unis et la Chine étant en tête de peloton dans la liste des pays qui pratiquent cette politique. Au rythme actuel, si rien n’est fait, la dette publique mondiale atteindra les 100% du PIB d’ici 2030. Le FMI reproche également aux pays où la dette dérape le plus de faire preuve d’une certaine naïveté dans l’ampleur des mesures à prendre pour tenter d’enrayer le phénomène, notamment lorsqu’il s’agit de prévoir l’avenir. Le FMI considère qu’un nombre très important de pays sont concernés car ceux dont la dette ne devrait pas se stabiliser représentent plus de la moitié de la dette mondiale et environ deux tiers du PIB mondial.

Profiter de la baisse des taux

Le Royaume-Uni, le Brésil, la France, l'Italie et l'Afrique du Sud sont particulièrement montrés du doigt par le FMI, qui redoute que « les niveaux d'endettement futurs soient encore plus élevés que prévu, et que des ajustements budgétaires beaucoup plus importants que les prévisions actuelles soient nécessaires pour les stabiliser ou les réduire avec succès». Le FMI insiste sur le fait que les pays devraient profiter de la détente actuelle des politiques monétaires pour adopter des politiques budgétaires bien étudiées qui protègent la croissance et les ménages vulnérables, en se basant sur les économies réalisées grâce à la baisse des taux. Comme l’inflation diminue partout, le FMI juge le moment opportun pour que les pays reconstituent leurs réserves budgétaires et chiffre l’effort – hausses d’impôts et/ou réductions de dépenses – à 3% à 4,5 % du PIB en cumulé sur un horizon de moyen terme si l’on veut parvenir à réduire la dette dans le monde.

Revoir les priorités

Le FMI juge aussi que les économies avancées devraient redéfinir les priorités des dépenses, augmenter les recettes par le biais des impôts indirects là où la fiscalité est faible et supprimer les incitations fiscales inefficaces. C’est d’autant plus important que les dépenses publiques pour financer la transition vers une énergie plus verte, ainsi que le vieillissement de la population et les problèmes de sécurité, ajouteront inévitablement aux pressions budgétaires au cours des prochaines années, sans qu’on soit capable de les chiffrer exactement dans la plupart des cas. Le rapport du FMI intervient alors que la Chine tente de rajeunir son économie avec une énorme relance budgétaire et que les élections américaines se tiennent dans trois semaines. Les plans économiques de Donald Trump et de Kamala Harris devraient en effet gonfler la dette fédérale américaine de milliers de milliards de dollars, selon un récent rapport du Comité pour un budget fédéral responsable.

Inquiétude des marchés financiers

Les marchés financiers sont inquiets de ces dérapages de dettes et cette inquiétude se traduit depuis quelques jours par des ventes massives d’obligations sur certains marchés, poussant les taux d’intérêt à nouveau vers le haut.

 

La BCE confirme les inquiétudes du FMI, puisque l’institution de Frankfort estime que pour atteindre un ratio dette/PIB de 60% d'ici 2070 (souvenons-nous que c’était ce à quoi tous les pays européens s’étaient engagés dans le cadre des accords de Maastricht il y a bien longtemps), par rapport aux niveaux d'endettement actuels, les gouvernements devraient augmenter immédiatement et de façon permanente leur solde primaire – le solde budgétaire hors paiements d'intérêts nets sur la dette publique.

Le chemin sera long et semé d’embûches mais il faut tenir ces chiffres à l’œil car l’Europe ne pourra pas se permettre une autre « crise de de dette », surtout si celle-ci concerne des pays dont la dette publique est dix fois plus importante que la dette grecque qu’il a fallu sauver en 2011. Jusqu’ici, la remontée des taux d’intérêt à long terme a été plus marquée aux Etats-Unis qu’en Europe mais rien ne dit que les choses restent en l’état par la suite.