La réaction de la consommation aux chocs de revenus
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Comment réagissons-nous à un choc de revenus ? En cas de choc positif, consacrons-nous tout l’argent ainsi gagné à la consommation ? Et à quoi exactement ? À des biens de consommation durables ou non durables ? Ou aux deux ? Et dans le cas contraire, lorsque nos revenus baissent, nous montrons-nous tout aussi économes ?
Kris Boudt, Koen Schoors, Milan van den Heuvel et Johannes Weytjens de l’UGent se sont penchés sur ces questions. Traditionnellement, l’étude de la propension marginale à consommer, c’est-à-dire le changement dans les dépenses en cas de changement dans les revenus, se heurte à plusieurs limitations.
Historiquement, ce type de recherche a surtout été mené sur la base d’enquêtes et d’observations macroéconomiques. Les 4 chercheurs flamands ont apporté de la nouveauté. Ce qui rend leur approche unique ? La taille de leur ensemble de données.
Les ménages belges et leur réflexe de consommation
En collaborant avec notre banque, les chercheurs ont pu disposer des revenus professionnels anonymisés d’1,4 million de ménages exclusivement belges, sur une période de 12 ans. Ces chiffres ont été complétés par des indicateurs socioéconomiques et autres, ce qui a permis d'obtenir une image représentative de la population totale[1].
La propension marginale à consommer, ou PMC, joue un rôle important dans l’analyse macroéconomique. En effet, la PMC détermine entre autres l’ampleur du multiplicateur de revenu dépensé. Plus le PMC est élevé, plus grand sera, par exemple, l’impact positif total de dépenses publiques supplémentaires sur le PIB.
Mais comment calcule-t-on ce PMC ? Il s’agit d’un pourcentage de changement dans les dépenses calculé par rapport à un pourcentage de changement dans les revenus.
Revenus et consommation
Dans un premier temps, les chercheurs ont identifié plusieurs types de chocs de revenus, avec à chaque fois une variante positive (augmentation) et une variante négative (diminution). Un choc de revenus peut être permanent ou temporaire. Et les chocs temporaires, à leur tour, peuvent se produire de manière récurrente ou de manière ponctuelle. Il peut s’agir, respectivement, d'une augmentation de salaire, d’un pécule de vacances ou d'un bonus spécifique.
Les dépenses ont été étiquetées d’après la classification de la consommation COICOP. Quatre types de consommation en sont ressortis : les biens de consommation durables, les biens de consommation semi-durables, les biens de consommation non durables et les services. Le graphique ci-dessous montre la part relative de chacune des 4 catégories dans la consommation totale.

Les résultats
Le tableau ci-dessous résume les principaux résultats. Dans ce cadre, on a opéré une distinction entre les ménages dotés d’un patrimoine liquide limité et les autres ménages. Il n’est pas étonnant que les ménages réagissent durement à un changement permanent dans leurs revenus.
Conformément à la littérature, les ménages riches consomment une part bien plus limitée de l’augmentation de leurs revenus. Dans presque toutes les catégories, la réaction à une diminution est plus faible que la réaction à une augmentation de même proportion.

Mais en cas de chocs de revenus temporaires, le consommateur réagit également. Ce qui est intéressant, puisque la théorie économique part du contraire. En effet, un consommateur parfaitement rationnel devrait compenser ce type de choc, conformément à la théorie du revenu permanent.
Cela pourrait être dû au fait que de tels chocs temporaires (boni, incapacité à prester autant d’heures de travail qu’avant) sont inattendus pour la plupart des ménages.
L’étude menée offre un bon aperçu de l’impact de différents mécanismes d’aide aux revenus. Il est évident qu’une augmentation permanente (onéreuse) peut avoir l'impact le plus important pour les ménages dont le patrimoine est le moins élevé. La différence entre une augmentation de revenus annuelle récurrente et une augmentation ponctuelle est donc très faible.
[1] Il convient de noter que les chercheurs ont uniquement examiné les revenus professionnels. Pour les données relatives à la consommation, les chercheurs se sont basés sur l’établissement où avait lieu l’achat. Une bonne méthode d’approche pour pouvoir déterminer le type de consommation, même si elle est imparfaite.
