L’emploi américain au centre du jeu
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Les offres d’emploi et les démissions sont reparties à la hausse au mois d’octobre, alors que tout le monde pensait que le marché du travail américain se refroidissait après des années d’euphorie. Il se pourrait que non et c’est important pour la Fed.
Octobre meilleur que prévu
Le marché du travail américain semble avoir changé au mois d’octobre et c’est une information à surveiller avec attention. D’après l’enquête JOLTS (Job Openings and Labor Turnover Survey) du Bureau of Labor Statistics publiée tout récemment, la situation serait différente de celle qui prévalait depuis quelques mois. Les données continuent certes d'être brouillées par la grève chez Boeing qui a duré jusqu'en octobre et s'est terminée au début de novembre, et par 3 ouragans – Francine, Helen et Milton – dont les fortes pluies et les inondations ont temporairement fermé des chantiers dans une grande partie du pays. Mais il faut y regarder de plus près.
Ces événements ont considérablement pesé sur les chiffres relatifs à l’emploi et un beau rebond du nombre de créations d’emplois pour le mois de novembre serait logique (à voir cet après-midi). Par contre, les chiffres qui viennent d’être publiés et sur lesquels nous nous penchons aujourd’hui se rapportent, eux, au mois d’octobre et c’est en cela qu’ils valent la peine qu’on s’y intéresse. Car octobre aurait dû être mauvais et c’est le contraire qui semble s’être passé. Les chiffres traduisent en effet un léger resserrement du marché du travail : les offres d'emploi ont connu une hausse, les démissions ont remonté également, les licenciements ont baissé et le ratio le plus important, le nombre d'offres d'emploi par chômeur, a légèrement augmenté alors qu’il baissait depuis quelques mois.

La Fed surveille
La Fed pourrait-elle en arriver à faire marche arrière par rapport au rythme et à la profondeur des baisses de taux envisagées pour la suite ? Il est vrai que la baisse des taux décidée en septembre avait surpris par son ampleur (-50 points de base) mais nous savons à présent qu’elle avait été déclenchée par ce qui s’est avéré être une fausse alerte sur le marché du travail, lorsque les créations d’emplois du mois s’étaient avérées nettement en-dessous des attentes. Voilà en tout cas de quoi donner du grain à moudre à ceux qui spéculent sur ce que la Fed fera (ou ne fera pas) lors de sa prochaine réunion, le 18 décembre 2024.
Le turnover massif de la main-d'œuvre en 2021 et 2022 avait clairement pris fin, car moins de personnes démissionnaient, laissant ainsi derrière elles moins d'offres d'emploi à pourvoir, et moins de personnes disponibles pour pourvoir ces postes. Mais octobre semble avoir été le théâtre d’un revirement qui indique peut-être une augmentation de la demande de main-d'œuvre et un resserrement du marché du travail.
Le ratio préféré de la Fed
Le nombre d'offres d'emploi par chômeur – une mesure du degré de tension sur le marché du travail que le Président de la Fed affectionne tout particulièrement – est remonté à 1,1 emploi ouvert par chômeur. Cela signifie qu'il y a encore un peu plus d'offres d'emploi que de chômeurs à la recherche d'un emploi.
Ce ratio s’était stabilisé pendant quelques mois, après avoir beaucoup baissé jusqu'en juin 2024. C’est cette baisse qui avait en partie motivé le patron de la Fed à baisser les taux directeurs de 50 points de base au mois de septembre. La Fed cherchait alors à empêcher que le marché du travail ne se refroidisse trop.
Au cours des derniers mois, il y avait eu moins de départs volontaires, ce qui signifie moins de postes nouvellement ouverts à pourvoir, donc moins d'offres d'emploi et moins d'embauches pour pourvoir ces postes. Pour les employeurs, la productivité augmente lorsque les travailleurs restent plus longtemps et maitrisent mieux leur métier et les hausses de salaires se modèrent parce que les employeurs n'ont plus à inciter les travailleurs avec des programmes de rémunération agressifs à rester ou à venir travailler pour eux.
Mais la nouvelle remontée du nombre de démissions observée en octobre, si elle se maintient, pourrait être le premier signe que les travailleurs reprennent confiance sur le marché du travail, qu'un plus grand nombre d'entre eux sont embauchés par des employeurs plus agressifs et que l'herbe semble plus verte ailleurs une fois de plus. Ce sont peut-être les premiers signes d'un marché du travail qui se tend à nouveau : l’inverse du scénario de la Fed et de beaucoup d’analystes.
À suivre…
