Black Friday : journée noire pour les moteurs de recherche ?

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Le mois dernier, le Black Friday a envahi tous les espaces publicitaires. Ce phénomène, qui a vu le jour aux Etats-Unis, marque le coup d’envoi des fêtes de Noël… et des achats qui s'accumuleront au pied du sapin. Grâce aux données de transactions anonymisées, nous pouvons analyser le comportement d’achat de nos clients – en ligne et en magasin – pendant cette période. 

L’E-commerce en hausse de 70%, les LLM peinent à s’imposer comme assistants de shopping.

Qui guide les achats en ligne ? 

La part de l'e-commerce dans les dépenses totales a explosé pendant les confinements liés au COVID, et cette tendance se poursuit. Sur l'ensemble de l'année 2025, un quart des dépenses de notre échantillon s’effectue en ligne. Lors du dernier Black Friday, cette part des achats en ligne a grimpé à 33%. En outre, le budget consacré aux achats en ligne affiche une progression constante. Influencer les comportements d’achats en ligne vaut aujourd’hui de l’or, comme en témoignent les centaines de milliards que les marques dépensent chaque année en publicité en ligne. 

La fin des moteurs de recherche ? 

Les publicités sur les réseaux sociaux performent généralement moins bien que celles des moteurs de recherche. Ceux-ci capitalisent en effet sur l’intention claire de l’utilisateur, telle que décrite dans sa requête. Cela permet une publicité plus ciblée, ce qui augmente souvent les chances de conversion en acte d’achat. Mais l’IA pourrait bouleverser cet équilibre

Une étude récente montre en effet que les nouveaux utilisateurs de LLM (les « Large Language Models », comme ChatGPT ou Perplexity) délaissent progressivement les moteurs de recherche, avec une baisse d’utilisation de plus de 20%. Résultat : moins de trafic pour les sites référencés sur les moteurs de recherche classiques.* 

Chatbot shopping 

Mais suivons-nous plus souvent les conseils shopping des LLM ?  

C’est une question que Sam Altman, le CEO d’OpenAI – l’entreprise derrière ChatGPT –, se voit régulièrement poser. Les chatbots comme les siens offrent aux utilisateurs, gratuitement ou contre un abonnement mensuel, un nombre illimité de tokens. Un système « à volonté » pour un prix fixe, donc. Cela place Altman et ses équipes dans une position désavantageuse par rapport aux grands acteurs technologiques : une recherche sur Google coûte aussi de la puissance de calcul au géant américain, mais celui-ci peut monétiser chaque recherche en y associant des annonceurs.  

Un exercice d’équilibre difficile pour des entreprises comme OpenAI, donc. On pourrait croire que celles-ci sont assises sur une véritable mine d’or. Des recherches récentes montrent en effet 3 avantages majeurs des chatbots pour rediriger leurs utilisateurs avides d’achats vers des sites de vente en ligne : 

  • Les LLM disposent de plus d’informations de contexte sur leurs utilisateurs, avec qui ils échangent souvent des dizaines, voire des centaines de messages par jour.  
  • Les LLM captent davantage de caractéristiques des produits intéressants que les moteurs de recherche traditionnels, qui se basent plus fréquemment sur des mots-clés.  
  • Les LLM formulent des suggestions d’achat sous forme de conversation, ce qui les rend plus crédibles et convaincants.  

Les chercheurs démontrent que les LLM nous incitent davantage à acheter que les publicités sur les réseaux sociaux. Mais les moteurs de recherche obtiennent un meilleur taux de conversion (CR) et un revenu moyen par session plus élevé. Cependant, les auteurs de l’étude observent des effets d’apprentissage : l’écart de conversion devrait probablement continuer à se réduire dans les mois à venir. 

Pour l’instant, les développeurs de LLM spécialisés n’osent pas encore intégrer de messages publicitaires dans leurs fenêtres de conversation. Mais ils sentent aussi dans leur nuque le souffle des hyperscalers, qui disposent de moyens financiers bien plus importants. Plier ou rompre ? 2026 s’annonce comme une année intéressante. Mais d’abord, il faut bien terminer ces achats de Noël.  

*On observe surtout une forte baisse des visites sur les sites éducatifs, comme Stack Overflow. À noter : les chercheurs ne constatent pas le même effet sur d’autres sites communautaires comme Wikipedia et Reddit.