- 4/9/2025

Une crise n’est pas l’autre

Les derniers jours ont été chahutés en bourse, c’est le moins que l’on puisse dire. Il s’agit d’une nouvelle tempête qui, comme les autres, est arrivée sans que l’on s’y attende, secouant et laissant tout le monde perplexe. Et maintenant ?

Sylviane Delcuve

Senior Economist

La dernière fois qu’un tel épisode s’est produit, c’était en 2020, avec le Covid : en l’espace de quelques jours, les principales places boursières avaient perdu 40%. Le pétrole s’écroulait et le spectre de la récession planait sur un monde mis à l’arrêt pour cause de pandémie.

La liste des griefs est longue

Aujourd’hui, la crise est provoquée par la guerre commerciale initiée par le président Trump qui cherche à restaurer la compétitivité et l’attractivité de son pays en remettant à plat un ensemble très complexe de « situations » qui se sont installées au fil du temps. Des faits qui ont conduit à un déficit abyssal des comptes commerciaux des USA, provoquant une désindustrialisation massive et des pertes d’emplois depuis des décennies au profit d’autres régions du monde. C’est en tout cas comme cela qu’il semble voir les choses, d’après le rapport intitulé « Les barrières au commerce extérieur en 2025 » élaboré par son Bureau Exécutif. Ce document de 400 pages reprend les principaux griefs de l’administration américaine à l’encontre de ses partenaires commerciaux, avec un degré de détails surprenant. La lecture de ce rapport illustre à quel point il y aura du travail pour remettre cela « à plat ».

Le chaos provoqué unilatéralement

Toutes les crises sont différentes, on le sait. Cette fois, un élément mérite d’être souligné, car il pourrait avoir un impact sur l’issue de la tempête. Lors des deux dernières crises majeures auxquelles nous avons été confrontés - à savoir la crise sanitaire de 2020 et la crise financière de 2008 - un élément tangible et externe était à la base de la tourmente : on en était là sans que personne n’ait délibérément « jeté un pavé dans la mare ». Aujourd’hui, oui. Avant les déclarations tonitruantes de Donald Trump et sa guerre commerciale, les marchés se portaient bien. La situation économique était confortable partout et l’avenir semblait serein, même si chaque pays était confronté à ses propres défis et enjeux et que le contexte géopolitique, lui, était extrêmement tendu. Sans cette guerre commerciale et les déclarations « tous azimuts » sur l’efficacité gouvernementale, l’envie d’annexer le Groenland ou encore le Canada, les marchés financiers qui regardent avant tout l’environnement économique, n’avaient aucune raison de plonger dans le chaos.

Qui appeler à la rescousse ?

Lors des crises précédentes, la panique qui s’était emparée des marchés avait nécessité l’appel à l’aide d’un intervenant bien particulier : la banque centrale. « Le prêteur en dernier ressort », comme on l’appelle souvent. Dans les 2 cas, en 2008 et en 2020, il a suffi que les banques centrales entrent en action pour calmer le jeu. Le prêteur en dernier ressort est venu en aide au système en injectant de manière massive de l’argent dans les circuits financiers, afin d’éviter la récession et une crise de liquidités. L’entrée en action des banques centrales avait marqué le tournant de la descente aux enfers des places boursières, même s’il a parfois fallu de longs mois avant de retrouver les niveaux d’avant la crise.

Aujourd’hui, la situation est très différente et on voit mal comment les banques centrales pourraient intervenir dans ce chaos « provoqué » par le président des USA et par lui seul... Il va falloir négocier avec lui, c’est évident. Il sera coriace et ne lâchera sans doute pas grand-chose, d’autant que l’horizon est dégagé puisque les élections de mi-mandat n’auront lieu qu’en novembre 2026. C’est uniquement lorsque les tensions s’apaiseront, grâce à des compromis qui auront été trouvés, vraisemblablement « au cas par cas » qu’on saura que le point bas est derrière nous. Patience donc...

Les opinions exprimées dans ce blog sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement la position de BNP Paribas Fortis.