Où en est le marché du travail américain ?

2 min

La dernière édition de l’enquête JOLTS menée par le Bureau of Labor américain semble confirmer que le marché du travail reste tendu. Quel impact pour la politique monétaire en 2025 ?

Comprendre où en est le marché du travail américain est un point crucial pour qui veut tenter de savoir si et quand la Fed pourrait baisser à nouveau ses taux d’intérêt directeurs. La hausse plus forte que prévu des offres d'emploi du mois d’octobre qui avait suscité tellement de volatilité sur les marchés a entretemps été révisée à la hausse, tandis qu’en novembre, 259.000 offres d'emploi supplémentaires étaient publiées, portant le total des emplois à pourvoir au niveau très élevé de 8,10 millions, un niveau nettement supérieur au record pré-pandémique de fin 2018. La dernière enquête du Bureau of Labor Statistics (Job Openings and Labour Turnover Survey, le JOLTS) sur les offres d'emploi et la rotation de la main-d'œuvre est menée sur environ 21.000 lieux de travail. Cette enquête est utile et souvent riche en enseignement sur l’état du marché, les démissions ou encore les licenciements. Elle permet en outre de se faire une idée sur les chiffres relatifs aux créations d’emplois du mois suivant, les fameux « non farm payrolls » tant attendus par les marchés financiers chaque mois.

Démissions et postes à pourvoir : le paradoxe

Le constat qui ressort de la dernière enquête relative au mois de novembre est le suivant : il y a moins de personnes qui quittent leur emploi – les démissions volontaires ont considérablement diminué par rapport aux sommets de la pandémie – ce qui implique qu’elles laissent moins de « postes vacants » derrière elles. Ceci devrait logiquement conduire à une réduction des offres d’emploi visant à combler ces « trous » hors c’est le contraire qui semble se produire : au mois de novembre, les offres d'emploi (à pourvoir) ont considérablement augmenté alors qu’il y a moins de démissions. Ceci signifie donc que de nouveaux créneaux à pourvoir qui n'existaient pas auparavant apparaissent. La demande de main d’œuvre augmente donc !

Quand on pense aux projets du futur président des Etats-Unis en matière de réduction de la dépendance aux importations et à ses souhaits de voir l’industrie se développer sur le sol américain, on mesure mieux l’ampleur du phénomène actuel et à venir. On comprend aussi, en toile de fond, que le débat sur l’immigration risque d’être plus compliqué que prévu. De nombreux secteurs utilisent cette main d’œuvre aujourd’hui et ne verraient sans doute pas d’un bon œil un éventuel départ de son personnel.

Changement de ton à la Fed

Sans surprise, ces chiffres qui sont scrutés de près par les autorités monétaires ont provoqué un changement de ton à la Fed : lors de sa réunion de décembre, la banque centrale a annoncé ne plus prévoir que 2 baisses de taux maximum, contre 4 auparavant. Il faut ajouter à ceci le fait que l’inflation ne baisse pas non plus comme prévu, de sorte que le comité monétaire (FOMC) a relevé ses projections d'inflation d'ici la fin de 2025. La combinaison de tous ces éléments a donc logiquement fait dire au patron de la Fed « qu’il y avait encore du travail à faire », ce qui signifie moins de baisses des taux, du moins pour le moment.

Le ratio préféré de la Fed

Le nombre d'offres d'emploi par chômeur est une mesure de la tension du marché du travail que Jay Powell commente beaucoup. Ce ratio est remonté à 1,13 ouvertures par chômeur : il y avait 8,098 millions d'offres d'emploi à pourvoir en novembre pour 7,145 millions de chômeurs à la recherche d'un emploi. Il est important de se souvenir que la forte baisse de ce ratio au cours du premier semestre de 2024 avait été l'une des raisons que le patron de la Fed avait spécifiquement citée pour justifier la réduction massive de 50 points de base des taux directeurs en septembre. À l’époque, nous étions tous persuadé que cet indicateur illustrait bien le refroidissement en cours du marché du travail américain. Force est aujourd’hui de constater que ce refroidissement n’est peut-être plus d’actualité. En terme météorologique, on pourrait même parler d’un nouveau réchauffement.

À suivre…