Le pétrole secoué par la guerre commerciale
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Le prix du pétrole baisse depuis plusieurs semaines, et la décision toute récente de l’OPEP+ de procéder à une augmentation de sa production au cours des 18 prochains mois vient ajouter une couche aux perspectives moroses du secteur.
L'OPEP+ (alliance entre les pays de l’OPEP et 10 autres pays producteurs dont la Russie, le Kazakhstan et le Mexique) a en effet déclaré qu'elle mettrait en œuvre un plan d'augmentation de la production de pétrole à partir d'avril, dans un mouvement inattendu du cartel. L'Arabie Saoudite et 7 autres membres du groupe OPEP+ avaient déjà retardé à plusieurs reprises un plan visant à mettre fin à des réductions de production de longue date, et beaucoup tablaient sur un report de cette décision. L'OPEP+ vient en effet de déclarer qu'elle procéderait au « retour progressif et flexible » de 2,2 millions de barils par jour de production de pétrole au cours des 18 prochains mois. Le prix du brut Brent a chuté à son plus bas niveau en près de 3 mois suite à cette annonce.
Le pétrole subissait déjà les inquiétudes concernant l'impact potentiel des tarifs américains sur l'activité économique, ce qui explique pourquoi les prix du brut avaient déjà baissé de 10% en peu de temps, mais la décision de l’OPEP+ a accentué le mouvement.
La guerre commerciale : double peine
Le président américain ayant confirmé début mars que les États-Unis imposeraient prochainement des droits de douane de 25% sur les marchandises importées du Canada et du Mexique, 2 choses frappent le marché en même temps, ce qui n’est pas anodin, loin de là.
8 pays vont augmenter leur production à partir d'avril : l'Arabie Saoudite, la Russie, l'Irak, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Kazakhstan, l'Algérie et Oman.
Dans le même temps, aux États-Unis, on tente d’empêcher de noyer le marché, surtout depuis l’arrivée de Donald Trump qui avait fait du forage un pilier de son programme économique : le fameux « Drill, baby, drill » ! C’est un fait qu’en 2024, la production et les exportations américaines de pétrole brut ont atteint un nouveau record si bien qu’un peu de discipline est devenu souhaitable si on veut éviter un plongeon des prix. Il faut donc forer mais pas trop quand même ... Selon les derniers chiffres de l’Agence Internationale pour l’Énergie, les États-Unis ont produit 13,3 millions de barils par jour, en hausse de 2,5% sur un an et en hausse de plus de 160% depuis 2008, date du début de la fracturation hydraulique qui permet d’aller chercher du pétrole là où c’était impossible avant, dans des roches peu perméables.
Empêcher la surproduction
On sait à quel point le prix du baril est important pour la rentabilité de la fracturation hydraulique. Qui a oublié l’envolée des faillites dans le secteur lorsque le prix du pétrole avait brusquement chuté en 2015, quand la demande mondiale avait ralenti et que l’offre de pétrole était excessive ? Souvenons-nous qu’alors, le baril étaient tombé à $26, un niveau intenable pour les producteurs américains. Il faut éviter cela à tout prix !
On estime aujourd’hui que la fracturation hydraulique est rentable autour de $70 le baril, et il s’avère que du côté des producteurs non américains de pétrole, on a également besoin d’un niveau minimum pour équilibrer les comptes. Le temps où l’OPEP produisait et s’en sortait avec un baril autour de $15 à 20 est bien loin …

Quelles conséquences ?
À l’heure où l’on continue à viser une inflation plus faible, aussi bien en Europe qu’aux États-Unis, la perspective d’un baril de pétrole en recul, ou à tout le moins stable autour du niveau actuel, est une très bonne nouvelle ! Un fait rare dans le monde actuel, secoué par des tensions politiques inédites et une guerre commerciale qui s’annonce sans merci !
