- 26/5/2025

L’industrie manufacturière sous pression

3 min

Ecrit par

Arne Maes

Senior Economist

Les entreprises manufacturières belges ont-elles gagné en pessimisme ? 

D’après les estimations de la BNB, l’industrie belge n’a apporté aucune contribution à la croissance économique du premier trimestre de cette année. Fait notable : avec ce résultat, le secteur signe sa contribution la plus positive, ou plutôt la moins négative, depuis fin 2022. Une situation géopolitique complexe pèse sur les perspectives de ces entreprises. Quel est leur sentiment ? 

Des problèmes, des problèmes, des problèmes 

Chaque trimestre, la Commission européenne interroge les entreprises manufacturières de l’UE sur les obstacles qu’elles rencontrent dans leur processus de production. À cette occasion, elles peuvent indiquer si elles éprouvent des difficultés à trouver des matériaux, des machines, du personnel ou des moyens de financement. Il arrive aussi que la demande pour leurs produits diminue, ce qui veut dire qu’elles produisent en sous-capacité. Enfin, les entreprises peuvent également déclarer si elles ne rencontrent aucun de ces problèmes. 

Le graphique ci-dessous suit la proportion d’entreprises qui ne rencontrent « aucun problème », pour un groupe de pays européens. Il montre que, jusqu’à la pandémie, les entreprises manufacturières néerlandaises et allemandes enregistraient de bien meilleurs résultats que leurs homologues d’autres pays européens. En 2019, plus de la moitié des sociétés manufacturières néerlandaises disaient ne pas connaître de limitations à leur production. Cette part était beaucoup plus faible dans notre pays durant toute la même période. 

L’impact du Covid 

Depuis 2020, en revanche, les entreprises manufacturières néerlandaises et allemandes disent beaucoup moins souvent ne pas rencontrer de limitations de production. Elles se sentent entravées par la pénurie qui frappe le marché du travail. Détail intéressant : cette pénurie (mesurée en taux de vacance d’emploi pour l’industrie) s’élève à 3,5% pour la Belgique, juste entre les Pays-Bas (4,5%) et l’Allemagne (2,5%). Pourtant, la proportion d’entreprises qui s’en inquiètent est deux fois plus élevée aux Pays-Bas et en Allemagne qu’en Belgique. 

D’autre part, depuis la pandémie, on observe une convergence à la baisse entre les 22 pays européens interrogés. Les entreprises sondées font de plus en plus souvent état d’un recul de la demande. En dehors de la période du corona, la part de producteurs qui se plaignent de la demande a atteint son niveau le plus élevé en plus de dix ans. Dans le même temps, le taux d’utilisation des capacités de production est très bas.  

Les investissements au frigo 

Ce déclin s’accorde avec les échos perçus par la BNB au dernier trimestre lors de son enquête trimestrielle auprès des chefs d’entreprise. Les managers du secteur de la production insistent sur la dégradation structurelle des conditions d’activité des entreprises en Europe. Entre autres défis de taille, citons les coûts de l’énergie toujours plus élevés en Europe par rapport à l’Asie et à l’Amérique du Nord, des frais considérables liés à la règlementation et à la mise en conformité, ainsi que des règles environnementales de plus en plus chères. S’y ajoutent naturellement les inquiétudes relatives aux mesures protectionnistes. 

Le sentiment des entreprises manufacturières belges s’est un peu réchauffé récemment en raison d'un carnet de commandes plus fourni, mais la question est de savoir si celles-ci vont se maintenir. 

Dans l’ensemble, il est fort probable que les sociétés manufacturières se montrent beaucoup plus prudentes dans leurs décisions d'investissement au cours des prochains mois.

https://www.nbb.be/doc/ts/publications/bcm/2025_03_bcm_publication.pdf