La croissance belge : une accélération provisoire, puis un ralentissement
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Après une flambée provisoire qui aura fait grimper la croissance économique, un environnement externe difficile viendra gâcher la fête. Notre nowcast voit le moteur économique mettre les bouchées doubles : de 0,3% au dernier trimestre à 0,5% pour la période d’octobre à décembre. Ensuite, en 2025 et 2026, des tarifs douaniers accrus et l’incertitude qui les entoure viendront peser sur notre PIB. Notre croissance trimestrielle ralentira, passant de 0,3% à 0,2% en moyenne.
Ces dernières années, la croissance économique de la Belgique s’est maintenue. Et ce malgré des circonstances externes difficiles. Nous avons su compenser la chute du PIB due au coronavirus plus rapidement que d’autres pays d’Europe, et même le choc de l’énergie a à peine ralenti notre croissance économique. Alors même que la croissance allemande s’arrêtait, le PIB belge n’a fait que croître. Le vent tournera-t-il bientôt ?
Le nowcast Q4 est de 0,5%
La BNB a publié ses chiffres finaux pour le Q3 : une croissance de 0,3%. Un peu plus rapide que le 0,2% supposé, donc. Cette hausse s’explique surtout par une reprise effrénée de la consommation privée. En effet, celle-ci a progressé de pas moins de 1,4% entre juillet et septembre, notre plus belle accélération depuis la Covid.
D’autre part, les données relatives aux transactions de nos clients entreprises évoluent positivement. Ces chiffres, agrégés donc anonymisés, constituent un ingrédient unique de notre nowcast, une collaboration avec l’Ugent. Même les indicateurs HFI (indicateurs de haute fréquence), plus traditionnels, affichent majoritairement une évolution positive. Parmi les commerces, la confiance approche son point le plus élevé depuis 2022, malgré une petite baisse en novembre. Chez les entreprises de construction et les prestataires de services, le sentiment s’est amélioré également. Seule l’industrie garde l’esprit pessimiste.
Au final, nous nous retrouvons avec un nowcast (quantitatif) de 0,5%.
À première vue, ce chiffre paraît très élevé, surtout si on le compare à la croissance tendancielle d’environ 0,3%. Il est donc rassurant que la BNB soit parvenue à une conclusion similaire dans son BCM en début de semaine : la série de modèles neufs et moins neufs que la banque utilise dans cet exercice donnent des estimations variant de -0,8 à 2,8, mais là aussi, la médiane se situe à 0,5%. D'un point de vue historique également, ce 0,5% n’est pas si surprenant. Entre 2009 et 2024*, la croissance trimestrielle a atteint un niveau au moins tout aussi élevé un trimestre sur trois.
Plusieurs facteurs ponctuels pourraient aussi entraîner une flambée temporaire de la croissance. Par exemple, la crainte de la hausse des droits de douane incite ceux qui exportent vers les États-Unis à tenter d’écouler encore leurs produits rapidement. Le résultat : une augmentation temporaire des exportations**.
L’impact du gouvernement Trump II
Nos collègues de Londres ont décrypté l’impact potentiel des mesures commerciales avancées par le prochain président des États-Unis. Ils partent du principe que la taxe à l’importation de produits chinois augmentera de 25% de points, pour atteindre un taux moyen effectif de 40%. Pour les autres pays, il s’agirait d'une hausse de 3% de points, en vigueur dès la fin 2025.
Les États-Unis constituent une destination importante pour nos exportations... mais pas autant que nos voisins. L’Allemagne, la France et les Pays-Bas reçoivent près de la moitié de nos exportations, contre un peu plus de 5% pour les États-Unis. Mais nous n’en serons pas moins vulnérables, ne fût-ce qu'indirectement, lorsque les nouvelles mesures instaurées ralentiront la croissance en France et en Allemagne.
Aujourd’hui, nous tablons sur l’hypothèse que les tarifs douaniers et l’incertitude qui les entoure entraîneront une hausse cumulative d’à peine 1% de points du PIB trimestriel d’ici la fin 2026. Autrement dit, le taux de croissance trimestrielle ralentira pour passer de 0,3% à 0,2% durant les deux prochaines années. L'impact total restera ainsi assez limité : pour 2025 et 2026, nous abaissons nos prévisions de croissance de 1,3% à 0,9%.
Plus encore que d’ordinaire, ces pronostics sont soumis à une forte incertitude. Quelles contre-mesures prendront les pays qui se sentent touchés par la hausse des tarifs ? Verrons-nous bientôt un gouvernement fédéral accélérer la consolidation fiscale, avec une réduction des dépenses publiques à la clé ? Une chose est sûre : il y aura de quoi alimenter les conversations sur l’économie autour du repas de fête.
* Pour ce calcul, nous avons fait abstraction des années Covid 2020-2022.
** D’un autre côté, les stocks diminueraient en même temps, mais cette conséquence ne pourrait se manifester (en partie) que lors de trimestres ultérieurs. Quoi qu'il en soit, si les exportations venaient à augmenter maintenant, cela ne durera pas
