- 2/4/2025
Pas une semaine ne passe sans que le sujet des finances publiques européennes ne soit évoqué. Entre dépenses de réarmement, nécessités de poursuivre la lutte contre le réchauffement climatique ou encore d’assurer son indépendance en matière de ressources (terres rares, puces électroniques, course au développement de l’IA), des sommes extravagantes sont citées partout, sans qu’on sache parfois d’où viendra l’argent pour financer ces nouvelles dépenses. Les compteurs s’affolent parfois, incitant certains pays à prendre un peu de recul.
La situation des uns et des autres diffère, certes, ce qui rend certaines dépenses beaucoup moins problématiques à financer pour certains que pour d’autres.
Senior Economist
Le cas du Portugal interpelle particulièrement en ce début du mois d’avril, car le pays vient d’annoncer qu’il ne laisserait pas l'augmentation des dépenses de défense mettre en péril son excédent budgétaire si durement gagné. Le pays vote au mois de mai et les sondages suggèrent que l'Alliance démocratique de centre-droit du ministre est dans une course électorale serrée contre les socialistes de l'opposition, avec de fortes chances qu'aucun des deux ne soit en mesure de former une majorité parlementaire stable. Le printemps pourrait être chaud au Portugal, et pas seulement sur le plan météorologique !
En matière de gestion des finances publiques, le pays revient de loin, puisqu’en 2011, il a été pris dans la tourmente de la crise des dettes souveraines initiée par la déroute grecque. Souvenons-nous qu’à l’époque, la dette publique y avoisinait les 130% et le déficit 10% du PIB. Le pays s’est imposé une cure d’amaigrissement public qui a laissé des traces dans la population. 13 ans plus tard, la dette est repassée sous la barre des 100% du PIB et le pays affiche un léger surplus sur son budget (0.2% du PIB). On comprend dès lors que la perspective de perdre le contrôle de ses comptes passe mal, d’autant que le pays est davantage tourné vers l’ouest que vers l’est et qu’il n’est pas proche du front ukrainien. La nécessité d’augmenter les dépenses militaires pour garantir la sécurité physique y est d’office moins pressante qu’en Pologne, en Lettonie ou en Suède. Les dépenses militaires représentent 1.6% du PIB portugais, contre 5% en Pologne. Le pays s’est certes engagé à atteindre l'objectif de 2 % fixé par l'OTAN d'ici 2029, mais on comprend sa réticence à aller au-delà, comme l’OTAN le prévoit.
Le Portugal est l’un des rares pays de la zone-Euro, avec l’Allemagne, le Danemark et l’Irlande à afficher un surplus budgétaire. Il veut se garder de la marge en cas de retournement de la conjoncture : le maintien d'un excédent budgétaire est par ailleurs vu comme essentiel pour continuer à réduire le taux d’endettement du pays. L’objectif étant de revenir à 80% d’ici la fin de la décennie.
Alors qu’en Allemagne et au Danemark, la décision de dépenser plus sur le plan militaire a été prise, il semble qu’au Portugal, on se pose davantage de questions sur le financement et sur l’impact de ces nouvelles dépenses sur le coût de l’emprunt. Le ministre des finances portugais a déclaré que le Portugal était prêt à faire plus en matière de dépenses militaires, mais qu’il voulait d'abord prendre connaissance des conditions et de la manière dont les coûts d'emprunt se comparaient pour le pays sur le marché de la dette souveraine. Le rendement des obligations d'État portugaises à 10 ans est actuellement de 3,25 %, inférieur à celui de la France, de l'Italie, de l'Espagne et de la Belgique, signe que le Portugal est considéré comme un emprunteur moins risqué. Une fameuse victoire quand on voit d’où vient le pays ! En ce qui concerne les priorités en matière de dépenses, le Portugal juge qu’il est essentiel que les membres de l'UE se coordonnent pour soutenir les industries spécialisées dans chaque pays. Le Portugal compte de solides constructeurs navals et l'avionneur Ogma, qui appartient au brésilien Embraer. La société portugaise Tekever, quant à elle, a fourni des drones à l'Ukraine.
La sagesse est donc de mise au Portugal : Chacun sa route, chacun son chemin donc …
Les opinions exprimées dans ce blog sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement la position de BNP Paribas Fortis.
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